Royan 2015 : 48h sur circuit

C’était un vendredi. J’avais pris un jour de congé et je le passais à Royan. Pas sur la plage, non. Au stade. Et j’allais y rester jusqu’à dimanche matin. 48h à faire des tours sur une boucle d’un peu plus d’un kilomètre, une boucle bien entortillée sur elle-même, qui nous permettait de profiter du quart Sud-Est de la piste d’athlétisme trois fois par tour. Nous, les 130 et quelques zoziaux engagés sur les 48h, 24h et 12h de Royan.

Mon premier 48h. La première fois que j’allais dépasser 143 km de course d’une traite.

Sans trêve et sans repos

Tout sourire
Il fait beau, c'est le jour 1 (clin d’œil à ma fille Garance). Tout va bien, pourvu que ça dure.

Le format 48h est réputé particulièrement exigeant. C’est plus que 100 km. Moi, je les ai déjà parcourus en 14h12, les meilleurs en deux fois moins. Le temps limite d’une course de 100 km, c’est 24h si on veut l’ouvrir à un très grand nombre. Souvent nettement moins. 48h, c’est plus que 24h aussi. Deux fois plus. Mais je ne pense pas courir deux fois plus de kilomètres ! Mais 48h, c’est aussi une durée que certains tiennent sans sommeil. Du tout. Et pour les autres, parmi lesquels je me situe, ça mérite repos, mais un repos minimal. Quelques cycles de sommeil dispersés judicieusement, calibrés au strict minimum.

Sur une course plus longue, un six jours par exemple, même les meilleurs prennent le temps de dormir. Si j’y participais - quand j’y participerai -, je pense que je dormirai(s) des nuits complètes, ou presque. Sur 48h, nenni. Il faut avancer, ne pas gaspiller de précieuses, et relativement peu nombreuses, heures de course. J’avais donc prévu de dormir peu : une lichette en fin de première nuit et un chouïa en début de seconde.

Vers 1h du matin le premier soir, j’ai atteint les 100 km. C’était bien, j’étais en forme. Mais une fois atteinte cette marque symbolique, les deux nuits de la course se sont dressées devant moi telles deux créneaux énormes barrant mon avancée. La nuit c’est le froid de plus en plus intense, les yeux qui se ferment malgré les cafés successifs, l’attente interminable de l’aube. Et il y en aurait deux ! Je ne voyais plus la journée entre les deux. Comment pourrait-elle me régénérer ? Il était relativement tôt, j’ai choisi de me coucher pour longtemps. J’ai mis mon réveil deux heures et demi plus tard.

Un lit de camp, les pieds surélevés par mon sac de voyage, un bon duvet, un T-shirt sec. Bien sûr, dès que je me suis allongée des décharges de douleurs ont envahi mes jambes. Bien sûr, je me suis endormie très rapidement malgré tout. Mais je me suis réveillée avant le réveil et… j’ai fait une grasse matinée jusqu’à ce que le réveil sonne, à 3h30. Peur de la nuit.

Avancer

L'entrée du tivoli
A l'entrée de la zone de ravitos. A ma tête, je dirais qu'un certain nombres d'heures et de kilomètres étaient déjà passés sur moi.

Sur le terrain, j’ai retrouvé la boucle que je connaissais déjà bien. Nous traversions un tunnel de tentes, entre deux rangées de tables de ravitaillement. Puis nous effectuions quasiment un tour de piste. Demi-tour en arrivant au niveau des tentes, nous longions à nouveau la piste, en croisant par l’extérieur les coureurs sur la première partie de la boucle. A l’opposé, nous faisions à nouveau demi-tour, et contournions un peu plus au large la piste d’athlétisme, avant de rejoindre finalement l’entrée des tentes.

Je séparais mentalement la boucle en trois parties, que je considérais égales : l’aller, le retour, et l’aller final. Je ne comptais pas du tout la traversée des tentes. Ce n’étaient donc que des tiers mentaux, absolument pas connectés à la réalité du terrain.

Dans la première journée, j’avais suivi un plan simple : un quart d’heure marché pour trois courus. Maintenant, engoncée dans mes vêtements chauds, je choisis de courir deux tiers de tour pour un marché. C’est-à-dire que je commençais à courir quelque part pendant la traversée des tentes, et que j’arrêtais au deuxième demi-tour. Mais au moins, j’avançais. C’était une fin de nuit froide, classique, attendue. Je voulais parcourir au moins 200 km pour mon premier 48 h. C’est bien. C’est au-delà de mon plus gros kilométrage réalisé d’une traite : 143 km aux 24h de Saint-Fons. Je sentais bien que je pourrais, physiquement, tenter d’atteindre 240 km, c’est-à-dire 5 km/h de moyenne. Mais là dans la nuit, avec la perspective d’une affreuse deuxième nuit, je n’arrivais pas à me projeter dans cet objectif. Il avait vaguement existé avant la course. Il s’était évaporé.

Et le jour qui n’arrivait pas.

Dans les oreilles

Mon casque
Le casque blanc, c'était celui avec la musique. Le noir avait les romans. Comme ça, il n'y avait que le bouton on/off à toucher. J'aime bien cette prise de vue parce qu'on voit bien les 3 passages de la boucle.

J’avais préparé des sons à me mettre dans les oreilles. De la musique et du texte.

C’est important de bien choisir la musique à écouter pendant sa course. Moi j’aime bien les chansons à texte. Et j’écoute beaucoup de morceaux tristes, de morceaux lents. Alors ceux-là, je les ai évités. Imaginez un peu : un coup de mou et hop, vous écoutez La berceuse du clochard. Pas sûr que ça aide à rester sur la piste.

Alors je me suis fait une Play-List spéciale course. Que des morceaux positifs, suffisamment dynamiques. De trucs de Christian, mon mari, c’est-à-dire un certain nombre de morceaux qu’il a pompés chez Bide et Musique. Des trucs de nos filles, Fatals Picards ou Aldebert. Quelques trucs à moi aussi. Quand même.

Et puis la nuit, quand le silence des haut-parleurs se faisait, j’ai écouté des romans lus. J’ai terminé « Certaines n’avaient jamais vu la mer » de Julie Otsuka et commencé « Le trône de fer », à défaut de regarder la série. Un roman lu, ça aide bien à avancer. Ça ne change pas toutes les trois minutes comme les chansons, on est pris dans l’histoire, on oublie le reste. Mais ça demande aussi une concentration qui pénalise les échanges avec d’autres coureurs. Et ça devient inécoutable quand l’animateur de l’épreuve est en pleine action, en journée.

Nuit puis pluie

Le jour approchait. La délivrance. Il y aurait de la lumière, du bruit. Et puis même des coureurs supplémentaires. A 8h30 partait l’épreuve de 12h ; à 10h celle de 24h. L’eau est arrivée lorsque les coureurs des petites épreuves se sont pointés au gymnase, à l’aube. Il faisait un peu moins froid, j’avais enlevé le gros blouson. J’ai mis une veste imperméable. L’eau a traversé. Et la capuche me gênait : le bruit de frottement, la vue rétrécie.

Nous nous retrouvions donc de plus en plus nombreux sur une piste relativement étroite. Et j’étais mouillée. Je n’arrivais plus à courir, je ne supportais pas les bruits de frottements, la sensation humide sur mes bras. J’ai mis des heures à me convaincre que ma veste de pluie moins épaisse, la rouge et grise identique à celle de plusieurs coureurs sur la piste, serait plus efficace. Je ne l’ai portée qu’après le déjeuner. Efficace, elle l’a été. Elle a même fait cesser la pluie en une ou deux heures.

Nous étions en milieu d’après-midi. Mes vêtements préférés étaient humides. J’essayais de me remettre à courir et ça n’était pas facile. J’ai essayé d’accrocher Christian. Ça m’a demandé plusieurs tours. Alors que son rythme n’était pas toujours rapide, j’ai eu de très grandes difficultés pendant cette course à lui parler. Il était toujours trop loin sur la boucle, ailleurs physiquement et mentalement. Je jalousais ceux que je voyais parcourir un bout de chemin en sa compagnie. Il était sociable, comme toujours, mais très difficile d’accès pour moi. C’était pitoyable, j’ai eu tellement peu de moments pour lui parler que j’ai eu l’impression de faire un résumé de mes plaintes en dix secondes chrono à chaque fois que j’arrivais à l’accrocher.

Ce deuxième après-midi, mes plaintes étaient particulièrement virulentes. La pluie avait cessé, mais j’étais convaincue qu’elle était perverse, qu’elle s’était cachée pour mieux revenir bientôt. J’en voulais au ciel, à l’eau, au temps et à certainement tout ce sur quoi je n’avais aucune prise. Christian m’a juste dit d’aller me coucher. J’ai donc dormi une heure en plein milieu d’après-midi, le deuxième jour, alors même que le temps était enfin correct.

Mais le sommeil m’a fait du bien. J’ai pu recourir, par séries de deux tiers de tour. J’ai à nouveau calculé le nombre de kilomètres, la durée avant d’atteindre mes fameux 200 km. D’ailleurs je ne me souviens même pas du moment où j’ai dépassé ma meilleure marque, les 143 km. Ce devait être dans la pluie.

Présence du corps

Le ravito
Chacun son verre, des tartines pour tous, de la soupe, du café, des sourires. Bref, un ravito aux petits oignons.

Tout de même, le corps devient péniblement présent au fur et à mesure de la course. J’ai perdu 8 kg au printemps et j’ai bien fait. J’avance plus vite, et je fatigue moins. Je mets des chaussures trois ou quatre pointures au-dessus de la mienne. Ce n’est pas une façon de parler, j’ai couru avec des chaussures taille 44. Je me crème les pieds, je noue mes lacets avec un très grand soin. Avant la course, je me coupe les ongles, je ponce la corne. En échange de quoi, je n’ai pas eu d’ampoules. J’ai gardé de jolis pieds de bébé.

Des pieds qui me lançaient dès que je me posais dessus. Des jambes qui sont devenues lourdes. Mais quelque chose d’assez maîtrisé. Du côté des jambes, la plus grande difficulté provenait de la viscosité de l’air. Quand je marchais, des décharges électriques remontaient parfois de ma voute plantaire, et à chaque pas une douleur lancinante envahissait la plante du pied posé. Quand je courais, ces douleurs étaient moins fortes, mais il devenait de plus en plus difficile de lutter contre la viscosité de l’air. Il se faisait résistant, il pompait mon énergie. Je tenais quelques mètres et me remettais à marcher.

Je mangeais, je buvais presque à chaque tour, en passant devant les ravitos. Je buvais légèrement sucré, toujours. Et je mangeais un vrai repas, assis, aux heures habituelles. J’attendais ces pauses avec impatience. A chaque fois je me suis donné un nombre de tours à faire pour mériter le repas assis. Il n’y a que le déjeuner de midi du premier jour que j’ai pris en marchant. Dès le soir, je m’asseyais.

Malgré mes précautions, le premier soir a été rude. Je suis entrée dans le gymnase me servir un plateau repas. Je me suis assise, je l’ai regardé. Et la tête m’a tourné, ma vue est devenue floue. « Non, non, tout va bien, je vais juste sortir manger au frais. » Je ne sais pas par quel miracle j’ai réussi à porter mon plateau sans m’affaler. Je ne me suis pas beaucoup remplie à ce dîner. J’ai tout vidé.

Je ne pensais pourtant pas avoir grand-chose à extraire de mon corps. Etait-ce possible d’aller aux toilettes autant que moi ce premier jour de course ? Toutes les heures, j’étais assise sur la cuvette – propre, avec du papier, vraiment un endroit agréable ! Cela prouvait au moins que le processus de digestion continuait, même en courant.

Le deuxième jour, mon corps était relativement vide. J’allais moins aux toilettes. Je continuais à boire beaucoup, à manger de petites quantités très fréquemment. J’ai pris mes repas. Mais le peu que j’allais aux toilettes posait d’autres problèmes. On ne parle pas assez des brulures à l’entrejambe pendant les courses d’ultra. On s’essuie soigneusement, on prend soin des zones à risques. Mais l’urine, la sueur et les frottements finissent toujours par avoir raison de cette zone fragile. Et ça brule à en oublier ses pieds. Encore de la crème. Elle part au prochain essuyage. J’ai même fini par aller prendre une vraie douche, et je pense que le temps perdu a été récupéré par la suite.

Alors ça allait mieux. Je pouvais avancer, me concentrer sur mes jambes, mes pieds. Et mon corps de femme est revenu à l’attaque. Je savais que ça pouvait arriver, je l’avais déjà entendu dire. Mais franchement, il n’y avait chronologiquement aucune raison que j’en passe par là. Eh bien si. Des règles ont commencé à couler.

Paysage humain

Causette
Un brin de causette avec Fanny, une copine de course à pied de Christian. Sacré bonimenteur, il a réussi à embaucher sept débutants sur le 24h : sa sœur, des collègues, une copine !

Autant chercher à ignorer tous les appels du corps. Ne pas trop le martyriser, le nourrir, le faire avancer. Et penser à autre chose. Je rencontrais sur cette course beaucoup de personnes que j’avais déjà vues depuis le bord du terrain de jeu, en faisant l’assistance de Christian. Je fis connaissance avec d’autres. Emboîter le pas d’un ou deux coureurs, en rattraper un autre, ça permet d’augmenter le rythme, de passer le temps. Voire de franchement s’amuser.

Parmi les coureurs, certains sont physionomistes. Certains connaissent le nom de tout le monde. Pas moi ! Je ne reconnais pas les gens, même si j’ai déjà parlé des heures avec. Bien sûr j’ai des excuses. Les gens font de drôles de têtes, ils marchent de travers, ils ont tous un collant, une veste de sport. Quand on les croise, ça va trop vite, et sinon, on ne les voit que de dos. On arrive dessus, on discute, mais on continue à regarder où poser les pieds.

Et puis ils n’ont que des numéros. Il y a les nouveaux qui sont arrivés le deuxième jour, ceux des courses courtes. Je n’ai pas réussi à en identifier, excepté les copains de Christian. Et encore.

Pour connaître les noms des gens, la solution c’est de passer en même temps qu’eux la ligne de compte. Alors les noms s’affichent, avec la position, le kilométrage effectué. Et on essaye de retenir que le type sympa, là, il s’appelle Bernard. L’animateur parlait des coureurs, fournissait les performances de la tête de course. Parfois il donnait les trois premières féminines, et j’étais toujours la troisième. Julia Fatton et Mimi Chevillon étaient loin devant. Et je ne repérais pas du tout les personnes citées dans le haut-parleur.

J’ai atteint 200 km un peu avant 3h du matin, la deuxième nuit. Je n’avais plus envie de rien et certainement pas de tenter de parcourir 40 km en 7 h. J’ai réussi à trouver Christian. C’était plié, j’en avais marre. Je verrai ce que je ferais encore, mais en tout cas, pas grand-chose. Et qui était la quatrième féminine ? Où en était-elle ? Pouvais-je garder ma place podium jusqu’à la fin de la course ? Voilà ce qu’il me demanda. Je n’en savais fichtre rien. Je m’en fichais.

Enfin non, pas tant que ça, je m’en rendis compte en terminant ma boucle. Seulement, je ne connaissais les kilométrages des concurrents qu’au petit bonheur la chance, en fonction des dix précédents qui avaient passé la ligne de comptage lorsque j’arrivais. Ça pouvait être des concurrents du 24h, toutes sortes de types dont je n’avais pas idée de la tête… J’étais 21ème. Je ne savais pas qui était 20ème, 22ème. Et la fille… J’ai donc pris le temps de regarder le classement imprimé affiché au ravito. La quatrième femme était… Françoise Perchoc, dossard numéro 12. Restait à scruter les dossards des coureuses que je croisais. A défaut de me remotiver, cela m’obligerait toujours à effectuer une ou deux boucles de plus. Je trouvais Françoise et je pris peur. Je ne l’avais pas remarquée avant. C’était un petit bout de femme, sèche de corps, souriante, bref le genre qui semble avoir de la bouteille. Elle allait continuer d’avancer. Elle n’était pas du genre à se laisser décourager comme moi. Elle avait une vingtaine de tours de retard sur moi.

Il me fallut donc mettre au point un plan « réduction des dégâts ». D’abord, dormir peu. Une heure, je perdais cinq tours. Ca suffirait donc. Et puis repartir, conserver de l’avance, le plus possible. J’eus de grosses difficultés à repartir après la pause. C’était étrange d’entendre mon voisin de campement expliquer qu’il avait un gros mental, que c’est pour cela qu’il allait jusqu’au bout. Je me sentais piteuse, feignante, lente. Et pourtant, je repartis sur la piste avant lui.

L’objectif alors devint de ne plus me laisser attirer par ce lit douillet. Première décision : ne plus m’y rendre. Je m’autorisais les pauses, mais uniquement sur une chaise ou par terre. Deuxième décision : inviter Florence, ma belle-sœur, à aller se reposer dans mon lit. C’était plus sûr. Je ne savais pas quand elle l’utiliserait. Mais ça pouvait être n’importe quand, donc il n’était de facto plus libre. Troisième décision : 3 km par heure. Avec ça, Françoise pouvait peut-être me doubler. Mais au moins, je ne me serais pas faite doubler sans lutter.

Me voici donc partie pour 3 km. Trois kilomètres, et puis j’ai droit à une petite pause, jusqu’au début de l’heure suivante. Je marchais, mais je n’avançais pas si mal. J’étais motivée par la pause. A la fin de chaque heure, je m’allongeais sur le sol, les pieds surélevés, pour un bon quart d’heure de relâchement. Quel bonheur ! Une fois, je me suis franchement endormie sur le béton gelé, réveillée cinq minute après l’heure. Françoise me grignotait des kilomètres, j’abattais les trois de chaque heure. Le jour arrivait.

Sprint final

Serai-je capable de me remotiver pour la fin de course ? Certainement, mais je n’arrivais pas à savoir si ce serait pour un ridicule dernier quart d’heure ou pour deux heures, une durée affreusement longue vue d’ici, à quarante et quelques heures de course.

Ma Play-List spécial ultra s’enchaînait dans mes oreilles. Et je suis tombée sur le morceau qu’il me fallait. Pas un morceau de la discothèque de Christian, ni de celle de nos filles. Un morceau à moi, pour moi. 
Il te faudra une longue patience 
Il te faudra bien accrocher ton cœur 
Il te faudra d'abord croire à la chance 
Et n'y plus croire, et puis en avoir peur 

Sans même m’en rendre compte, je me suis mise à chanter, le casque sur les oreilles. Un instant plus tard, j’ai pensé aux autres, à ceux qui subissaient mes fausses notes, mes hésitations pour suivre paroles et musiques. Et puis j’ai continué. C’était la chanson qui fluidifiait l’atmosphère, celle qui me faisait avancer. 
Et certains soirs, et certains soirs 
Quand tu pleureras dans le noir 
Ne désespère pas 
Repars du même pas

C’était reparti. J’ai écouté la chanson quatre ou cinq fois d’affilée, en gueulant. J’ai senti une mauvaise agressivité qui se libérait en moi. Cette piste, j’allais lui en faire baver ! Elle allait encore les voir, les semelles de mes chaussures. Je ne m’arrêterais plus.

J’ai même essayé de courir. Je sentais moins la plante de mes pieds. Mais en trois foulées j’étais épuisée. J’ai marché, une belle accélération. Du quoi ? Peut-être cinq kilomètres par heure. J’y croyais, j’allais les finir, ces heures.

Dans le dernier quart d’heure, j’ai même attrapé Jean-Louis et Stéphanie, des collègues de Christian, par le bras : « Allez, il y a des minutes dans la vie où il faut savoir se forcer. Et c’est maintenant ! » J’ai réussi à embarquer Stéphanie. J’étais allègre, on avançait, on aller les gagner, nos derniers mètres. Encore un tour et demi, et c’était fini. 225 km, voilà ce que j’avais été prête à donner.

Et après ?

Sur le podium
Mais qu'est-ce que je faisais donc ??? De gauche à droite : Mimi Chevillon, Julia Fatton, moi-même et Françoise Perchoc, les quatre premières féminines.

Un podium, c’est haut et pas très stable. Et puis finalement, ce n’est pas si émouvant. J’ai pleuré au petit matin, sur la piste, quand j’ai reçu un message de ma fille Lise : « C’est bien Maman !!! » J’ai été grisée par mon petit finish. Dans le gymnase, à la remise des prix, j’étais simplement fatiguée et contente de moi. Je pourrais faire mieux, mon corps pouvait avancer plus. Je ne l’ai pas poussé dans ses derniers retranchements. Mais deux nuits, deux fois douze heures sans soleil, dans le froid. Et puis la pluie. J’ai réussi à ne pas me faire complètement abattre par ces monstres. J’ai même réussi à prendre la décision, dans la semaine qui a suivi, de m’inscrire sur un six jours. Il n’y a plus qu’à travailler tout ça.

Et sinon, mon mari a publié CR ici. Et sa collègue Alison, . Et ils sont tous les quatre, les deux compte-rendus, les deux zigotos, très bien.

(Cliquez sur les photos pour les agrandir. Vous aurez légende, navigation. La belle vie, quoi.)

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Mis à jour le mardi 20 octobre 2015.